Les ocres, entre naturel et artificiel
Pour la plupart, les touristes qui s’aventurent dans les ocres du pays d’Apt ignorent qu’ils contemplent là d’anciennes carrières. Sauf à Rustrel, peut-être, où un certain Pierre Martel avait inventé, dans les années soixante, le concept de “Colorado provençal”. Les exploitations y étaient et sont toujours perceptibles, mais le tourisme des sites industriels n’était pas encore, lui, inventé : c’était l’époque où s’ouvrait le sentier GR 6 Méditerranée Océan, et les visiteurs étaient rares.
Le patrimoine industriel est aujourd’hui très à la mode et c’est heureux, mais plus rares sont, comme ici, les sites industriels offrant, comme dans les ocres d’Apt, un champ aussi large de richesses : scientifiques, avec tous les phénomènes géologiques et technologiques qui se présentent, mais aussi, bien évidemment, esthétiques.
Ça n’est pas le moindre intérêt des ocres que d’étaler à nos yeux cette complexité : un paysage industriel somme toute récent (son âge d’or culmine en 1929 ! ), qui balance avec autant de facilité entre naturel et artificiel. Quelle pourrait être, demain, la perspective d’une reprise des carrières dans un gisement géographiquement limité et touristiquement affecté ? Produit (à défaut de dire : emblème) d’un proche passé industriel, le paysage des ocres saurait-il devenir celui d’un futur? Les ocres, laboratoire paysager du troisième millénaire? En géologie, on sait prendre du recul sur les choses de la terre.
Les sites d’ocre de Vaucluse sont aujourd’hui protégés au titre des sites (décret de septembre 2002) et font l’objet, depuis 2009, d’une démarche d’Opération Grand Site engagée par l’État et le PNR du Luberon.